MERCREDI 05 mai :
Ce matin, nous avons de nouveau changé de chambre. Cela commence à faire un moment que nous sommes bloqués en Suisse. La France n’ayant toujours pas rouvert ses frontières, nous sommes tenus de résider ici pour le moment, mais je ne me lasse pas de cet hôtel. Chaque chambre est un lieu d’évasion, de voyage. Nous avions le choix parmi plusieurs chambres, mais nous voulions de nouveau explorer une nouvelle composition de chambre.
La chambre est cette fois beaucoup plus étroite, le lit se situe au fond de cet espace longitudinal et prend place sous un plafond illustré par une scène de film encore une fois très sensuelle qui illumine le plafond comme une fresque de la modernité. Les couleurs sont froides et rompent avec le plafond coloré de tons chauds. La chose qui change le plus ici est la petite fenêtre qui donne sur le parc qui génère une ambiance complètement différente de celle que nous avions dans la précédente suite avec les baies donnant sur la terrasse. Une ambiance plus intimiste appuyée par un patio orné de bambou, tenant lieu de petit refuge en plein air, à l’abri des regards.
The sheltering sky ( un thé au Sahara) est un film dramatique italo-britannique, réalisé par Bernardo Bertolucci, sorti en 1990. Il est inspiré du roman éponyme américain de Paul Bowles, paru en 1949. L’histoire nous amène à suivre l’aventure de trois riches artistes américains, Port et Kit Moresby et leur ami George Tunner qui débarquent dans un port du Nord de l’Afrique avec l’intention de traverser le Sahara. Port est un compositeur désenchanté ; Kit, elle, est une auteure dramatique, plus optimiste mais aussi plus fragile. Leur couple traverse une crise douloureuse. Ils pensent que l’aventure représentée par le Sahara peut leur apporter l’oxygène qui leur manque. La scène que je vois au plafond m’intrigue : pourquoi celle-ci et pas une autre : Kit est allongée sur le dos, un drap ne couvrant que la partie basse de son corps et la poitrine nue, un homme la regarde. Les couleurs de cette scène me plongent tout droit dans une ambiance orientale, des tons chauds, jaunes, ocres, avec une lumière incroyable caressant et révélant les corps rendent cette scène incontestablement sensuelle.
« Le film le plus sensuel qu’il m’a été donné de voir.
Pour les Occidentaux, c’est la forêt qui est le lieu mystique par excellence , alors que pour les Orientaux, c’est le désert.
Les deux personnages principaux, Port et Kit Moresby, font preuve d’un nihilisme évident. Leur voyage est un voyage à travers l’espace, mais en même temps à travers l’abîme de leur psychologie. Ils prétendent venir en Afrique pour ressourcer leur couple, mais on comprend vite que ce n’est pas la raison première ; ils répondent en fait à un appel transcendantal irrépressible. Dès qu’ils descendent du bateau, leurs destins ne leur appartiennent plus, ils se fondent dans quelque chose de plus grand qu’eux. Ce voyage initiatique ne leur apprend pas à mieux se connaître, puisqu’il montre au contraire que l’individu s’efface aux confluents des grands espaces.
Le sexe, dans le film, suit le même schéma que décrit ci-dessus. Les règles formelles attachées au mariage sont dissoutes et diluées une fois qu’ils foulent le désert. Et ils se donnent à l’un et à l’autre uniquement parce qu’ils sont proches l’un de l’autre. La proximité sentimentale n’existe pas, seule la proximité physique compte. C’est la géographie qui dès lors dessine les contours du désir. «