A propos Chloé VALANCE

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L’immensité du monde

Après de nombreuses semaines passées au Juvet Landscape Hotel, il est temps de quitté ce paysage incroyable pour rentrer en France. Cette expérience m’a permis de me recentrer sur l’essentiel : la vie.

Fjord Norvégien

J’ai toujours portée beaucoup d’admiration devant la nature et tout ce qu’elle a à nous offrir. J’ai compris très vite l’importance que la nature peut avoir, nous n’avons aucun pouvoir sur elle, elle nous domine et de façon plus profonde, elle nous accueille et nous maintient en vie. La nature a tant à nous offrir, nous devons prendre exemple sur elle, sur sa force et sa bienveillance. Sa force est si grande et chaque catastrophe naturelle nous le rappelle. Sa beauté l’est encore plus, elle nous offre des paysages et des expériences incroyables, où il est difficile de trouver les moments pour expliquer les émotions qui nous traversent.

Juvet Landscape Hotel

Ces émotions c’est justement celles que j’ai ressentis en séjournant au Juvet Landscape Hotel. J’ai pu m’imprégner de toute l’énergie du paysage que j’ai observé chaque jour. Je l’ai vu changé au fil des saisons comme la végétation qui a grandit comme j’ai grandis de cette expérience.

Chacun de nous, dans sa vie, a sa propre montagne à gravir.

Cette expérience, immergée dans la nature, m’a rappelé un livre de Mike Horn : vouloir toucher les étoiles. Mike Horn est un explorateur des temps modernes. Il parcourt le monde avec sa tête et son corps comme seule énergie. Dans ce livre, il transmet au lecteur la magie que la nature peut offrir : « L’ombre noie tout. Soudain, c’est l’éblouissement. La lumière déferle. La beauté même éclate devant moi. J’assiste à la naissance du monde. Je suis sidéré. Ces montagnes tracées au pinceau devant un ciel infini, ces lignes d’une pureté absolue, ce jet de lumière cristalline qui balaie l’horizon. C’est une extase, une sensation de perfection… ».

Mike Horn lors d’une expédition

Les émotions qui nous transcendent face à un paysage, nous ramène à l’essentiel, à ce que nous sommes et à ce qui nous domine : « On peut sauter plus haut, aller plus loin, montrer plus de courage, élever le niveau d’endurance, mais il ne faut jamais, jamais oublier d’être simple. Devant la nature, l’humilité est obligatoire. […] Mes rêves restent les mêmes. Mais je n’oublie pas que je suis petit devant l’immensité du monde. ».

Cette humilité face au paysage que j’ai devant moi a été moteur de milliers de pensées sur notre place dans le monde et davantage en tant que future architecte : « C’est devant l’immensité de la montagne que je suis moi-même, petit, mais bien là. Il serait bien sûr illusoire de rejeter notre civilisation moderne/ Mais il faudrait retrouver le sens premier des choses. Le miracle des feuilles au printemps, le parfum du vent, le bourdonnement des abeilles, la beauté de l’horizon… Toutes nos puces électroniques, nos ordinateurs, nos écrans et nos robots ne nous donnerons jamais se bonheur. La simplicité, l’équilibre, voilà une quête essentielle. Renouer avec la terre, avec le sol, avec l’air. Nous nous sommes coupés du monde. Il importe de le retrouver. ».

Mike Horn, Vouloir toucher les étoiles, Pocket, 2015

Les couleurs du monde peuvent raconter tant de choses.

Profitant au maximum d’être dans les Fjords de Norvège pour une longue durée, je décide de visiter plusieurs villes. Ces villes reflètent l’esprit des habitants, en lien avec la nature, acceptant les climats rudes pour profiter de ce que la nature a à offrir : un paysage extraordinaire.

Reconnue comme la plus belle ville de Norvège, la ville d’Ålesund est celle qui m’a le plus marqué. Ålesund est un lieu où l’architecture est riche et homogène dans son style. La ville d’Ålesund se situe à presque deux heures de l’hôtel, sur les côtes de la mer de Norvège. Ålesund bénéficie d’un emplacement spectaculaire sur des îles étroites, là où les Fjords rencontrent l’océan. En 1904, la ville subit un violent incendie qui détruit la majorité des maisons en bois, la ville a dû se reconstruire rapidement, et le résultat offre une des plus belles concentrations d’architecture Art Nouveau.

Ville d’Ålesund

La colline Fjellstua est un lieu incontournable pour découvrir un panorama sur la ville d’Alesund et ses environs. Après 418 marches, la ville se dessine sous nos yeux avec l’accumulation de maisons colorées entouré par quelques collines et la mer.

Vue sur la ville d’Ålesund depuis le sommet de la colline Fjellstua

« N’est-ce pas étrange de créer quelque chose qui te déteste ? »

Depuis mon arrivée au Juvet Landscape Hotel, je ne cesse de chercher à en savoir d’avantage sur l’hôtel et le site. Au fil de mes recherches et des conversations, certains locaux mon conseillé le film Ex_Machina. Présenté comme un thriller psychologique de science fiction, j’étais réticente à le regarder seule en pleine nuit dans une chambre complètement ouverte sur le paysage… Mais ma curiosité a eu raison de ma peur puisque le film à été tourné au Juvet Landscape Hôtel. Le film évoque la capacité des robots à avoir une conscience.

Image du film

Le film raconte l’histoire d’un programmeur invité dans la maison luxueuse et isolée de son PDG. Le PDG vit seul avec son serviteur dans cette maison. Il révèle au programmeur qu’il a construit un robot humanoïde féminin nommé Ava avec une intelligence artificielle. Le PDG veut que le programmeur juge si Ava est vraiment capable de pensée et d’avoir une conscience même s’il sait qu’elle est artificielle. Ava a un corps robotique mais un visage, des mains et des pieds d’apparence humaine. Elle est confinée dans sa cellule isolée. Au fil des séances, le programmeur se sent attiré par Ava. De multiples échanges mènent le programmeur à faire davantage confiance à Ava qu’au PDG. Cette confiance finissant en manipulation d’Ava sur le programmeur, finit par prouver qu’Ava a réussi à faire preuve d’intelligence.

Image du film

Le Juvet Landscape Hotel est idéal pour ce film. Les multiples fond des espaces intérieurs ou de l’immensité du paysages offre à la fois un côté déconnecté du reste du monde par l’isolement, tout en retrouvant les fondements de nos existences par le lien avec la nature. Ces notions sont présentes sur le site de l’hôtel comme dans le film.

Valldal, entre Fjord et hauts sommets

La rivière Valldola présente à l’hôtel, traverse la vallée et finit son parcours pour se jeter dans le Fjord au niveau de la ville de Valldal. J’ai repris la route panoramique jusqu’à la ville de Valldal. La route enchaine les virages en épingle pour descendre jusqu’au niveau du Fjord. Tout au long de se parcours, la vue n’a pas cessé de m’impressionner. Je suis rester sans voix devant l’immensité de ce paysage sans fin mais en permanence surprenant.

Route panoramique

Valldal est nommée ville mais en France c’est ce que nous appelons un petit village. Une épicerie, quelques boutiques, des stations essences, plusieurs maisons parsemés, une église et un port forment la ville. A l’entrée de celle-ci, on retrouve une carrière due aux anciennes industries de ciment. La ville est « coincée » entre deux montagnes rocheuses. Vue de la ville, ces montagnes semblent gigantesque. La ville est connue pour être une base pour l’exploration de certains des plus coins de nature du pays. On y vient y pratiquer diverses activités comme le rafting, le canoë, l’escalade ou des randonnées. Bien que la ville semble petite, elle s’ouvre jusqu’à l’infini sur le Fjord.

Port de Valldal

La nature émerveille l’âme, le cœur, et l’esprit.

Le Juvet Landscape Hotel propose également un espace bien-être. J’ai pu en profiter régulièrement depuis mon arrivée. A quelques pas des chambres, le spa propose un moment de détente après avoir profiter des randonnées ou des pistes de ski. L’espace est conçu de façon à se sentir à l’abri dans une grotte ouverte sur ce paysage incroyable. Positionné juste au dessus de la rivière, cette espace offre une vue imprenable sur le parcours du cours d’eau.

Vue sur l’espace bien-être de l’extérieur

L’environnement dans lequel est positionné l’hôtel permet de se retrouver dans une ambiance calme et sereine. Le spa propose un sauna à vapeur, un jacuzzi et une chambre silencieuse. L’espace bien-être a toute sa place pour accentuer davantage le sentiment de se ressourcer auprès de la nature et oublier le quotidien.

Espace bien-être intérieur

Petit à petit, l’oiseau fait son nid.

Malgré mon admiration pour les cabanes paysagères, depuis plusieurs nuits, je me réveille dans une « chambre nid ». J’y suis arrivé, le soleil brillait et les températures étaient printanières. Depuis quelques jours, la neige est revenue avec la fraicheur.

La construction de l’hôtel c’est fait en deux phases : la première concernait les chambres paysagères qui a été compléter par une seconde phase avec des chambres nids. Ces chambres reflètent l’idée de cabanes dans les arbres. Les chambres nids sont des cabanes soulevées de la pente sur des tiges en acier très fine. Toute la boite est soulevée à plusieurs mètres au-dessus du sol. Cette élévation offre à l’intérieur un sentiment de hauteur et même de danger.

Intérieur d’une cabane nid

Lorsque je suis entrée dans la chambre, j’ai emprunté un petit couloir jusqu’au « salon » en double hauteur, avec plusieurs ouvertures sur différentes orientations. La chambre se compose d’un couloir d’entrée avec une salle d’eau, au dessus se trouve une chambre et les espaces se rassemblent sur le salon en double hauteur. La hauteur dans le salon surélever donne un sentiment de vertige. La cabane domine la vallée. Les tailles des fenêtres varient et sont placées pour donner à voir des éléments singuliers de la nature environnante. Les encadrements des fenêtres sont colorés par l’artiste Knut Wold avec la volonté de faire ressembler les murs à un jardin en fleur abstrait et ainsi de rapprocher de la tradition d’utilisation de peinture colorée et décorative utilisée à l’intérieur des maisons norvégiennes pour accompagner les étés colorés et vaincre les hivers grisâtres. De la même façon que dans les chambres paysagères, la cabane et le mobilier sont créés avec peu de matériaux et d’éléments différents offrant un sentiment de simplicité. Dans la cabane nid, construite en bois, les charnières sont surprenant, elles ne sont pas des charnières traditionnelles mais des poteaux cylindriques reposant dans un trou au sol et au plafond. Ce détail de charnière permet à la cabane construite en bois de bouger selon les intempéries, le bois peut se dilater et se resserrer. Ce détail n’est pas anodin, il exprime le fait de s’adapter à la nature. De la même façon que les chambres paysagères, les chambres nids s’ajoutent à la topographie existante sans changer le terrain, avec un respect profond de la topographie et du paysage.

Coupe d’une cabane nid intégrée dans son environnement

Les sensations et le rapport à la nature dans la cabane nid est entièrement différent, la seule similitude existe dans l’idée de faire partie de cette nature environnante. Mais habiter une cabane m’éloigne du sol, je suis perché dans les arbres, tout à coup, je me sens autant à l’abri qu’exposer. Certaines nuits, lorsque le vent se lève, la cabane tangue. Depuis mon lit, je sens mon corps suivre le mouvement de la cabane et des arbres. Les bois craquent et le vent siffle. Lorsque j’arrive enfin à me détacher de ma peur, la mélodie de la nature me berce jusqu’au lever du soleil.

Ouvrez votre cœur

Après plusieurs semaines passées dans l’hôtel, j’ai eu le temps de profiter des environs dans ce paysage magnifique et déconnecté du reste du monde. Bien que j’aime découvrir les environs, ma place préféré reste au chaud dans une cabane à profiter de la vue. Je ne cesse de vous décrire ces cabanes afin que vous compreniez à quel point elles sont grandioses tout en se concentrant sur l’essentiel. Le temps s’est arrêté au Juvet Landscape Hotel. Je passe parfois plusieurs jours enfermé dans une cabane, me réveillant avec le soleil, profitant de la vie de la forêt la journée puis m’endormant avec les étoiles.

Une cabane paysagère dans son environnement

Dans les cabanes paysagères, l’orientation est minutieuse afin d’offrir des vues exclusives sur une pièce magnifique et unique du paysage : parfois la rivière débordante, d’autre fois la forêt enchantée, ou encore la perspective fuyante vers les collines. Le paysage est changeant selon la saison, le temps et l’heure, il offre à chaque moment de la journée ou de l’année une atmosphère différente à la chambre. Le paysage n’est pas une simple toile de fond, il est l’élément principal à l’extérieur comme à l’intérieur. L’intérieur se projette sur l’extérieur et l’extérieur agit sur l’intérieur. L’orientation minutieuse des chambres-cabanes permet de maximiser les exigences d’intimité et d’offrir les meilleures vues possibles. La conception des ouvertures est un facteur de cet effet. Les cadres minces en bois éliminent l’effet de « bordure » ou de « clôture » que donnent habituellement une fenêtre et son encadrement, et offre plutôt l’effet de faire partit de ce grand paysage en le regardant, tout en conservant une ambiance privée, protégée et chaleureuse. L’installation d’un rideau permet de gérer les degrés d’ouvertures et de fermetures de la chambre pour des soucis d’intimité ou de luminosité. Cela fait maintenant plusieurs nuits que je passe dans le Juvet Landscape Hotel, j’ai essayé plusieurs chambres paysagères pour savourer pleinement les différentes vues sur le paysage environnant. Dans aucunes de ces chambres je n’ai utilisé le rideau (il paraît qu’ils sont très peu utilisé). Je sens mon corps s’adapter au rythme de la nature, du jour et de la nuit, au soleil et aux nuages… Je laisse les rideaux ouverts pour me sentir toujours connectée au paysage qui m’entour, plongée dans un extérieur entrant dans mon intérieur. C’est justement tout l’enjeu de ces larges ouvertures donnant la vue sur des pièces uniques. Ces ouvertures maintiennent au maximum la présence de l’intérieur dans l’extérieur. Chaque pièce a sa propre vue surprenante sur un paysage spectaculaire, toujours changeant.

Les bois nourrissent les poètes et les cabanes abritent les philosophes

Les cabanes sont posées sur les rochers sans aucun changement de terrain. Leur conception diffère selon les exigences de la topographie et de la végétation. Les cabanes naissent d’une volonté d’exploiter des paysages à couper le souffle, avec une ou deux façades entièrement vitrées, en conservant une intervention minimale. Les constructions reposent sur un ensemble de tiges en acier. La finesse des tiges encrées dans la roche prennent référence à des brins d’herbes sortant du sol et soutenant la cabane, comme une façon pour la nature d’accepter ses invités. Ainsi, une connexion durable est établie entre le site et la structure. L’observation conscience de la topographie existante et la géométrie de l’intervention mettent en évidence les irrégularités du site naturel expliquant ainsi le contexte avec plus de puissance. De jour, les cabanes en bois noir se mélange à la végétation et les rochers. De nuit, les façades vitrées forment un phare dans la montagne, donnant à voir un spectacle d’ombres et de lumière. La conception des chambres-cabanes permet une connexion durable entre le site et la structure.

Coupe d’une cabane paysage dans son environnement

A l’intérieur, les cabanes sont épurées au maximum. Elles se composent d’une salle d’eau étroite mais fonctionnelle, d’une table et d’assises intégrées au mur et d’une alcôve accueillant le lit, le salon spacieux s’ouvre sur le paysage, de cette façon l’espace principal devant l’ouverture est libéré. Les murs intérieurs sont noirs pour minimisés les reflets et éviter que l’intérieur prenne le pas sur l’extérieur. Le mobilier est en bois massif comme l’ensemble de la cabane pour maintenir un degré de monotonie qui contraste avec les vues complexes de la nature et pour garantir au minimum la présence de l’intérieur. Les pièces sont sans frontière conventionnelles afin d’expérimenter l’espace qui devient aussi grand que le paysage. Les chambres-cabanes diffèrent selon les conditions de chaque parcelle mais conservent les mêmes services de bases. Les grandes ouvertures donnent l’effet de faire partit du paysage avec l’intérieur sombre pour ne pas voler l’attention du paysage.

Intérieur d’une cabane paysage

La nature est reine

Il m’a fallu très peu de temps pour comprendre la volonté de construire un hôtel dans ce paysage magnifique, en revanche, il m’a fallu plus de temps pour comprendre tout les enjeux auxquels réponds le Juvet Landscape Hotel. Il n’a rien à envier aux hôtels traditionnels, avec des chambres conventionnelles empilées dans un grand bâtiment. Le Juvet Lanscape Hotel est un « hôtel paysager ». Un nom mais aussi un concept qui lui a été donné d’un commun accord entre le maître d’ouvrage Knut Slinning, résident local, et les architectes Jensen & Skodvin, convaincus par l’idée que la durabilité dans l’architecture ne doit pas se concentrer uniquement sur la réduction de la consommation d’énergie lors de la production et l’exploitation mais également sur la préservation de la topographie. Son nom « hôtel paysager » s’illustre par son organisation avec des chambres parsemées sur tout le terrain sous forme de petites maisons individuelles.

Plan masse de l’hôtel

L’hôtel se compose de plusieurs espaces distincts : une salle de cérémonie, un espace bien-être, et des chambres paysagère ou des chambres nids. Chaque espace est autonome, inséré dans le paysage sans le transformer. Les constructions de posent sur la topographie existante. Les maisons sont des invités sur le site.

Landscape Room
Bird House

L’hôtel a été pensé avec la volonté de construire un projet qui peut être enlevé sans laisser de cicatrice dans le paysage. Ce souhait d’une intervention minimale nait d’une conviction partagé entre maître d’œuvre et architectes : « Conserver le site est une manière de respecter le fait que la nature précède et succède l’homme. ». Au Juvet Landscape Hotel, la nature guide nos vies et nos choix, et nous lui devons le respect. Devant ces paysages extraordinaires, la nature reprend ses droits et nous fait découvrir toute la beauté qu’elle détient. Pour espérer s’immerger, nous devons prendre le temps de nous arrêter, de nous « déconnecter » de ce que nous connaissons du monde pour laisser la nature nous réapprendre à vivre.